Oiseaux

Mouettes ravissantes
ravisseuses
qui tournoyez dans le ciel d’hiver
dans la très haute lumière
vous êtes une
jusque dans votre dispersion
un flux ineffable lie entre elles
vos ailes blanches-battantes
qui acclament le jour
et ce qui est davantage que le jour
une blancheur native
une sphère dont vos corps
sont les projections folles et mesurées
un visage dont les grands yeux
s’abaissent vers le lac gelé
d’où vous avez pris votre essor
– et sur moi spectateur endimanché
qui se rallie à lui pour être entraîné
comme dans une débâcle
hors à jamais hors
de l’hiver de l’indifférence

——–

La cage est brisée, l’oiseau s’est envolé
il a franchi les monts du souci
les sommets neigeux de l’absence
les déserts enfouisseurs de source ;
les marécages où s’enlisent les désirs
les villes incestueuses où l’humain
ne connaît que l’humain
d’un large coup d’aile, il les a traversés
(ainsi un navire, après une halte dangereuse
dans une eau stagnante meurtrière
se reprend et, d’un bond en avant,
rallie les lointains ouverts)
Oh ! la joie qui fut la sienne
la profonde joie impérissable,
quand vint vers lui, porté par l’air,
le visage du Solitaire,
dans le ciel qui n’a pas de fin

——–

La poésie est cet oiseau
qui se pose sur l’appui de la fenêtre
et te regarde de son oeil cerclé
de vert et de bleu
Rien ne résiste à sa perspicacité
pas même toi
qui te veux opaque
cerclé de dur

——–

Epervier
qui danse et tournoie dans les airs
racé pur oblique
nourri de mille forces obscures
et heureuses qui t’emportent loin, loin
des demeures trop sûres
tes ailes se découpent
comme deux faux parallèles
sur le ciel d’orage
tu tranches dans l’épais des nuages
cherchant la perle enfouie
la perle d’aube et de silence,
illuminatrice, qui te fera renaître
vois : là-bas, entre deux nuées
un éclat se glisse, un rayon se joue
timidement d’abord, puis avec énergie
et audace, il balaie l’étendue
tel un faisceau de feu
Pourquoi hésites-tu ?
Vole vers la clarté !
sois notre éclaireur,
à nous
qui sommes enlisés dans l’obscur
la torpeur le dénuement

——–

Faucon inaltéré, inaltérable, de mes songes,
te voici, à la tête du cortège de mes Animaux
Va vers ta joie secrète
où verdoie l’arbre du consentement
ne reste pas dans l’air traversé
des faux sifflantes du temps
l’air de l’absence et du flottement
de l’errance des faux amours
tels des masques vides
que tu portes sans y croire
vois : des oiseaux plus heureux
sont tombés en eux-mêmes
dans leur propre espace
leur propre temps
et se mirent dans l’eau étale
changeante de leur âme
tout près, tout près
de l’arbre de consentement
(ses racines y baignent)
fais comme eux, mais va plus loin
traverse l’étang  miroitant
où glisse, cygne nonchalant,
ta secrète épouse
puis aborde l’arbre dru et plein,
immensément jailli de la terre humide
dans l’air comble et neuf
enfin grimpe à son tronc
jusqu’à la cime verdoyante
et baignée du vent sans fin
de ta joie secrète
où tu bâtiras ton repos.

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