Chiens
En Afrique, j’ai aimé un chien ; qui était-ce ? Je me souviens de sa longue langue rose, de ses yeux rieurs, de son corps éclaboussé de poils que nous entourions de nos bras complices… Comme il nous faisait fête ! Nous dansions corps contre corps, haleine contre haleine, et parfois, s’échappant de notre étreinte légère, il nous demandait de le rejoindre à quelques pas. Ses bonds étaient fantasques et musicaux, comme une phrase de jazziste virtuose. D’autres fois, s’arrêtant, il nous laissait le caresser : dans son regard se reflétaient alors nos présences – menues, légères, infatigables, petites silhouettes rendues presque transparentes à force d’être traversées de lumière et de ciel, ombres claires qui, pour finir, se noyaient, se dissolvaient dans la soie profonde de ces yeux de chien.
(Notes sans date, vraisemblablement 1994)